Kupfertorstraße 12 1914

Je m’appelle Hans David Blum, et j’ai grandi à environ dix minutes à pied d’ici. Il faut regarder bien attentivement pour apercevoir la petite plaque en laiton sur le trottoir devant cette maison, au n° 12 de la rue Kupfertorstraße. Il est inscrit sur cette plaque : centre médical depuis 1872.

Je vais parler des médecins juste après, mais d’abord un mot sur cet endroit : il ne reste plus rien de qu’il y avait ici au 17e et 18e siècle.

Les Français, qui, au 17e siècle, avaient occupé Breisach pendant plusieurs décennies, avaient construit ici un grand hôpital militaire. En 1700, Breisach était repassé sous contrôle autrichien.

Jusqu’à la destruction du bâtiment par les troupes françaises en 1793, il y avait ici un orphelinat et une maison de correction à laquelle était rattachée une fabrique de filoselle et de toile, qui exportait ses produits avec succès. C’est ce qu’explique le tableau sur le mur. Les dirigeants de cette fabrique étaient deux Suisses ainsi que Josua Uffenheimer, un juif de Kippenheim.

Le premier médecin à être originaire de Breisach s’appelait Max Wertheimer. Son grand-père Abraham, lui, était venu de Kippenheim et travaillait comme comptable pour Josua Uffenheimer.

Il est incroyable que Max Wertheimer, en tant que juif, ait pu à l’époque faire des études de médecine à Fribourg et à Heidelberg. Encore étudiant, il avait écrit un ouvrage, qui avait remporté un prix, sur un sujet très important : les risques infectieux pour les mères venant d’accoucher. Il avait acheté cette maison imposante. 

A partir de 1895, Breisach avait de nouveau un médecin généraliste juif, le Dr Karl Hugo Katz, de Berlin, qui laissa, par la suite, la maison et le cabinet à son fils, le Dr Fritz Katz. 

Finalement, juste au cours de l’année de ma naissance, en 1919, c’était au tour du Dr Hans Loewe a de reprendre la maison et le cabinet.

Le Dr Loewe est aussi devenu le médecin de famille de la communauté juive. Il était très apprécié. Les nazis l’ont harcelé et il a dû prouver qu’il n’avait pas d’ancêtres juifs. Aujourd’hui encore, il y a un cabinet Loewe : on y pratique la médecine depuis trois générations !

Dans la Maison bleue, on trouve aujourd’hui une copie de la thèse de doctorat du Dr Max Wertheimer, datant de 1888.